A propos de la Disponibilité de Flottes
Le #MCO est actuellement un aspect critique des flottes aéronautiques des Armées Françaises.
A cette occasion, on a pu voir apparaitre certains chiffres de « Disponibilité Opérationnelle ». Mais que se cache-t-il derrière ces chiffres ?
La notion de #Disponibilité, comme toute mesure de Performance, est relative à un ensemble d’axiomes (hypothèses, périmètres d’application…).
La notion de Disponibilité […] est relative.
Avant toute chose, posons le périmètre d’étude de cet article :
- Cet article n’a pas pour vocation d’identifier les causes de non-disponibilités, mais d’expliquer ce « KPI ».
- Nous ne considérerons ici que la disponibilité du matériel, indépendamment de toute influence extérieure à celui-ci :
Météo, disponibilité de l’équipage, disponibilité des équipements consommables (roquettes…), etc… - Les termes utilisés, ne sont pas nécessairement ceux utilisés par les Armées, mais correspondent aux normes de périmètres de mesure.
Notons au passage que le terme de « Disponibilité Opérationnelle » lui-même est abusif (dans le mode de mesure fait par les Armées), puisqu’englobant les appareils en Retrofit (ce qui constitue un temps de non-requis, qui relève de la Disponibilité Globale).
On peut considérer qu’un appareil opéré à 7 statuts potentiels :
- En mission
- En attente de mission
- En maintenance continue sur Heures de Vol
- En défaillance (panne, casse…)
- En immobilisation technique de Maintenance périodique
- En immobilisation technique de Retrofit
- En stockage longue durée
- La Flotte « Opérante » regroupe les appareils en mission [1]
- La Flotte « Opérable » inclut en plus ceux en prêts pour mission [2]
- Dans le cas d’une mesure à une échelle supérieure à celle du temps de maintenance sur Heures de Vol [3], la flotte « Opérable » inclut alors cette 3e catégorie.
(Il s’agit typiquement d’une mesure en nombre de jours, sachant que la maintenance sur vol se mesure en heures)
=> Afin d’enlever toute ambiguité, nous parlerons de « flotte opérable étendue » [FOE]
Ces statuts peuvent être classifiés en 5 taux de performance de disponibilité :
Ces taux se mesurent en nombre d'appareils par intervalles de temps sur une période donnée. Typiquement :
- en Jours.Appareils / Mois ou par An pour les taux de FOE,
- en Heures.Appreils / Jour pour le dernier.
- La Disponibilité Globale :
- DG = FOE / Parc Complet
DG = (1+2+3) / (1+2+3+4+5+6+7) - C’est une notion de base utile.
Néanmoins, elle a le défaut de ne pas se limiter aux seules capabilités de disponibilité du matériel :
En effet, Rétrofit et Stockages Longue Durée relèvent de la stratégie de gestion de parcs. - Et une mauvaise gestion dans le timing de ceux-ci peut avoir des conséquences néfastes :
Ainsi, par exemple, les hélicoptères Tigre sont en plein Retrofit HAP->HAD alors même que les besoins opérationnels sont importants du fait des Opex en cours.
Conséquence : le Tigre affiche une Disponibilité « Opérationnelle » [*] (telle que mesurée par les Armées) que de 25%… Mais parmi les 75% indisponibles, combien sont immobilisés en Retrofit, une question de (mauvaise) stratégie de gestion de flotte ?
[*] DO Armées = (1+2+3) / (1+2+3+4+5+6)
- DG = FOE / Parc Complet
- Vient alors la notion de Disponibilité de « Dispositif » (la « vraie » Disponibilité Opérationnelle) :
- DD = FOE / Parc mis à Disposition
DD = (1+2+3) / 1+2+3+4+5) - Pour rappel, un dispositif est en ensemble de moyens mis à disposition d’une fin stratégique.
Ainsi, les appareils laissés à disposition, hors gestion stratégique que sont les Retrofit et les stockages longue durée, constituent ce dispositif.
Il s’agit, dans sa définition, de la « vraie » Disponibilité #Opérationnelle. - Le grand avantage de cet indicateur est qu’il mesure réellement l’indisponibilité de maintenance opérationnelle, que constituent les visites périodiques de maintenance [5] et les problèmes de défaillances diverses de l’équipement [4] (pannes, casse, attente pièce de rechange, défaillance de soft, défaut de maintenance ou de performance…).
En d’autres termes, il mesure les conditions réelles d’exploitation et de maintenance.
- DD = FOE / Parc mis à Disposition
- Naturellement, s’ensuit derrière la Maintenabilité :
- DM = FOE / Parc Déployé
DM = (1+2+3) / (1+2+3+4) - La Maintenabilité est la capacité d’un matériel ou un système à être maintenu opérable.
C’est un indicateur important car il mesure la fiabilité dudit matériel ou système.
- DM = FOE / Parc Déployé
- Détour par la Disponibilité Intrinsèque :
- DI = FOE / Parc non-défaillant
DI = (1+2+3) / (1+2+3+5) - Il s’agit d’un indicateur qui isole les notions de défaillances de maintenabilité.
L’idée de cet indicateur est de mesurer le potentiel atteignable à pleine maturité du système (à la fois le matériel et l’organisation assurant sa maintenabilité). - Confronté à la Disponibilité de Dispositif, il permet d’identifier la non-fiabilité du système, même si personnellement je préfère mesurer un vrai taux de Fiabilité :
Fi = (1+2+3+5) / (1+2+3+4+5).
- DI = FOE / Parc non-défaillant
- Enfin, l’indispensable Disponibilité Mission (Disponibilité de Service) :
- DS = Flotte Opérable / FOE
DS = (1+2) / (1+2+3) - Malheureusement, les matériels ont besoin d’un temps de (re-)mise en condition avant ou après une exploitation (mission ou autre intervention) :
Maintenance à l’heure de vol, mise en condition de transport, déstockage longue durée…
- DS = Flotte Opérable / FOE
Illustrons par l'exemple :
Soit la flotte avec, sur une période, la répartition suivante :
1) 1 appareil
2) 1 appareil
3) 1 appareil
4) 2 appareils
5) 4 appareils
6) 0 appareil
7) 3 appareils
DG = 3 / 12 = 25% du parc complet est en état de voler
DD = 3 / 9 = 33% du parc non-rétrofitté est en état de voler -> Ainsi, avec ici 25% de la flotte en Rétrofit, l'impact est loin d'être négligeable
DM = 3 / 5 = 60% du parc non-immobilisé est en état de voler
DI = 3 / 7 = 43% est le niveau auquel le système pourrait être capable (en DD) avec une pleine fiabilité -> soit une marge de progrès de +30%
Fi = 7 / 9 = 78% de fiabilité
- DG\A{Opex} = 80%
- DG\A{Métropole} = 15-20%
- Parc Complet = 61 Appareils
Approchons-nous maintenant des chiffres communiqués :
On sait (cf. article de M. Cabirol), du cas du Tigre, les chiffres suivants :
On peut globalement obtenir ces valeurs avec les répartitions suivantes :
(Les répartitions données ici sont abstraites et servent uniquement à illustrer les différentes Disponibilités)
Clusters
Opex
Métropole
Total
Cumul
Opérable
4
11
15
(Target=20)
14
Indispo Maintenabilité
1
17
18
33
Visite Maintenance
16
16
49
V. Maint. Réallouée [**]
3
13
16
Retrofit et Autre
0
12
12
61
TOTAL
5 | 8
56 | 53
61
([**] Voir remarque plus bas sur l'anomalie du périmètre de calcul)
... Ce qui donne les taux suivants :
Disponibilités
Opex
Métropole
Total
de Maintenabilité
80%
(Dispo Opex)
40%
45%
de Dispositif
25%
31%
de Dispositif Alloué
50%
27%
31%
Globale
20% | 21%
25%
Ainsi, dans cet exemple, le #Tigre n’est pas à 25% de Disponibilité « Operationnelle », mais en fait sans doute de l’ordre de 30%. Seulement +5% de dispo ? Non : +20% ! (5% / 25%)
De la même manière, certaines flottes avec de fortes immobilisations de Retrofit dépassent en réalité sans doute les 50% de disponibilité : on peut citer ainsi le cas du Caracal dont la flotte, de taille réduite, est ancrée en plein Retrofit, ce qui a un impact non négligeable dans le calcul et la mesure de disponibilité.
(Je ne dis pas par ce propos qu’il faut se satisfaire de ces dispos. Je remets juste en perspective des valeurs isolées de leurs axiomes.)
On peut citer ainsi le cas du Caracal dont la flotte, de taille réduite, est ancrée en plein Retrofit, ce qui a un impact non négligeable dans le calcul et la mesure de disponibilité.
L’Armée gérant plusieurs bases, et des déploiement en Opex, il peut être utile de mesurer également ces différentes disponibilités par bases et/ou par « mode d’engagement » (Opex \ sur Base).
Et c’est d’ailleurs, entre autres, parce que les statuts de Maintenance [5] et Rétrofit [7] n’existent pas pour les matériels déployés en Opex que vous pouvez parfois noter un fort différentiel entre les taux de Dispo Opex et sur Base.
A l’inverse, ces derniers (ceux sur Base) sont doublement pénalisés puisqu’englobant les immobilisations de Maintenance des Appareils de retour d’Opex.
Cela constitue une anomalie dans le périmètre calcul de la disponibilité sur Base :
Pour les calculs de Dispo sur Base, les maintenances post-Opex devraient être classées avec les catégories [6] et [7] et sorties du calcul de Disponibilité de Dispositif sur Base, puisqu’il s’agit, du point de vue des bases, d’une gestion stratégique de flotte : la maintenance suite à un déploiement en Opex.
En conclusion, il est 2 points à retenir :
- La Disponibilité Opérationnelle, telle que mesurée par les Armées, inclut les appareils en Retrofit, qui constituent une immobilisation non pas liée à l’emploi ou à la fiabilité (du matériel ou de l’organisation), mais à une gestion stratégique de mise en dispositif.
- La Disponibilité en « métropole » inclut les maintenances des appareils de retour de déploiement Opex, ce qui ne permet pas d’afficher la Disponibilité du Dispositif de métropole. Cela pénalise d’autant plus cet indicateur que les appareils déployés en Opex nécessitent généralement une maintenance plus lourde, ceux-ci ayant été fortement sollicités et fait face à un environnement rude.
-
A lire : la 2e partie sur la Capabilité d’une Flotte :
– La notion de Taux de Réponse (où, là, la notion d’ « intrinsèque » aura un rôle crucial)
– Des notions de Capabilité (entre missions avortées faute de disponibilité et gaspillage de capacité opérable : comment optimiser)
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